Le mathématicien Cédric Villani, titulaire en 2010 de la Médaille Fields et lauréat 2014 du prix Doob, député de la cinquième circonscription de l’Essonne, a rendu le 28 mars 2018 son rapport sur l’intelligence artificielle. Cet article vise à présenter les 10 points clés/recommandations à retenir :
- Viser une politique économique articulée autour de la donnée, car la donnée est la matière première de l’IA. L’enjeu est confirmé par le fait que les grandes plateformes américaines captent le 80% de visites vers les 25 sites les plus populaires. Le rapport propose donc d’inciter les entreprises à « mutualiser » et partager leurs données, créer des données d’intérêt général, et mettre en place la portabilité de la donnée.
- Centrer les efforts de l’IA sur 4 secteurs stratégiques, ce rapport préconise ainsi de centrer les efforts sur 4 secteurs « matures » pour le lancement des opérations de transformations majeures : la santé, le transport ainsi que la défense et la sécurité.
- Création d’Instituts Interdisciplinaires d’IA (3IA) au sein d’une sélection d’établissements publics d’enseignement supérieur et de recherche. Les 3IA seront repartis géographiquement sur l’ensemble du territoire national, et diversifiés par thématique sur les divers domaines de l’IA.
- Création d’un supercalculateur conçu spécifiquement pour les applications d’IA, en partenariat avec des industriels. Ceci permettrait de rivaliser avec les grands moyens des grands acteurs privés.
- Multiplier par trois le nombre des personnes formées en IA, en orientant l’offre de formation existante vers l’IA, et aussi en créant de nouveaux cursus et de nouvelles formations ad hoc.
- Anticiper l’impact de l’IA sur le travail et expérimenter, afin de se doter des moyens nécessaires pour préparer cette transition. Le rapport préconise donc la création d’un modèle de formation pour préparer les transitions professionnelles, penser à la complémentarité humain/machine, et expérimenter de nouveaux modes de financement de la formation professionnelle.
- Libérer la « donnée écologique », afin de remédier à l’impact négatif des technologies numériques sur l’environnement. Ce rapport propose de faire des efforts pour créer des projets verts : reforestation, cartographie des espèces vivantes, diminution de la consommation d’énergie, conservation de la nature, etc.
- Création d’un comité consultatif d’éthique pour les technologies numériques et l’IA, qui serait chargé d’organiser le débat public, de façon lisible, construite et encadré par la loi. Ce comité doit garantir un haut niveau d’expertise et d’indépendance.
- Ouvrir les boites noires de l’IA, afin d’améliorer la compréhension des technologies de l’IA et augmenter leur adhésion sociale. Pour ce faire ce rapport préconise de développer la transparence et l’audit des algorithmes, de se pencher sur la responsabilisation des acteurs de l’IA autour des enjeux éthiques qu’elle soulève et de garantir un principe de responsabilité humaine particulièrement lorsque des dispositifs d’IA sont utilisés dans le cadre de fonctions régaliennes.
- Faire des efforts pour une intelligence artificielle inclusive et diverse. Actuellement les femmes ne constituent que 33% des personnes du secteur du numérique. Ce rapport propose de viser 40% d’étudiantes dans les filières numériques d’ici 2020, de faire évoluer les procédures administratives et renforcer les capacités de médiation, et finalement de soutenir les innovations sociales basées sur l’IA.
Si vous voulez approfondir cette étude, les principales références de cet article sont:
- Entretiens de 400 experts de l’intelligence artificielle
- Le rapport France Stratégie : Intelligence Artificielle et Travail
- Une étude comparative des politiques mises en place dans 15 pays
- Une consultation publique sur plus de 2000 participants.
- Une étude conjointe « Villani-Médiametrie » sur un échantillon de plus de 3000 personnes.